Jannik Sinner a confirmé son état de grâce. Seulement battu une fois sur les huit derniers mois, à Rome le 18 mai dernier - il a été suspendu trois mois pour dopage entre février et mai -, le numéro 1 mondial a fait plier Novak Djokovic vendredi pour rejoindre sa toute première finale à Roland-Garros (6-4, 7-5, 7-6(3)). Imperturbable malgré un public clairement à la faveur du Serbe et trois balles de set contre lui dans la dernière manche, l'Italien a confirmé qu'il était l'homme à battre du moment. Le poids des 24 titres du Grand Chelem de Djokovic ne l'a pas fait trembler, et Sinner tentera de remporter son troisième Grand Chelem consécutif, dimanche, face au tenant du titre Carlos Alcaraz.
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"On ne peut pas vraiment comparer moi et Carlos avec le Big 3"
Félicitations d'être arrivé pour la première fois en finale de Roland-Garros. C'était difficile de gagner contre Novak sur un court où il n'a pas perdu depuis trois ans ?
Un défi très difficile. Je pense que tout le monde a vu que c'était un match très difficile pour nous deux. J'ai essayé de m'accrocher mentalement, de jouer chaque point de la bonne manière, avec la bonne intensité. Oui, je suis très heureux. Comme je l'ai dit sur le court, c'est incroyable de le voir jouer à ce niveau et produire un tennis extraordinaire. Il est en forme physique extraordinaire également. Cela a été un match difficile, mais je suis heureux d'aller en finale.
Il y a quelques années, tu as dit à Alcaraz que tu espérais que tu jouerais beaucoup de matchs contre lui. Tu as déjà joué 11 matchs contre lui. Penses-tu que ta rivalité avec Carlos pourra un jour devenir l’une des plus grandes rivalités de l’histoire et que l’on pourra vous comparer au big 3 ?
Cela prend du temps de nous comparer aux big 3 ou big 4. Il n’y a que le temps qui nous le dira pour être honnête. Il est certain que, pour moi, c'est un joueur qui m'aide à améliorer mon jeu. Il me pousse dans mes limites. Il faut essayer de comprendre comment m'améliorer pour les prochaines fois que je vais le rencontrer. Je pense que le tennis, ou tous les sports, a besoin de ces rivalités. Cela pourrait potentiellement en faire partie. Il y a des joueurs incroyables qui arrivent. Il pourrait y avoir d'autres joueurs qui arrivent ou certains joueurs qui quittent le circuit. Je ne peux pas vraiment répondre. Je pense que l'on ne peut pas vraiment comparer moi et Carlos avec ce trio.
Était-ce essentiel pour toi de gagner le match en trois sets ou est-ce que tu étais confiant que tu avais la force physique pour continuer à jouer contre lui pendant 4 ou 5 sets ?
Sur le moment, on ne sait jamais ce qui arrive. Si j'avais perdu le troisième set, j'étais à 2 sets 1, mais les choses peuvent changer, le mental peut donner beaucoup de force ou alors le contraire. La partie négative également. Je suis très heureux d'avoir gagné en trois sets. J'insistais vraiment beaucoup lors du tie-break pour essayer de gagner, mais les choses peuvent se retourner rapidement. Il faut beaucoup d'énergie et beaucoup de petites choses. Si je baisse ma garde, il est très facile d'avoir un break, ensuite un autre set est parti et ensuite au cinquième set… Il a beaucoup d'expérience. Je ne sais pas. Je ne peux pas vous répondre.
"C'est stressant. Le fait de jouer contre Novak, de jouer contre les meilleurs joueurs du monde, on n'a pas de moments où on peut se détendre"
Tu as gagné en trois sets, mais il semblait que c'était stressant pour toi pendant la durée du match. Tu peux décrire le type de pression que Novak met à tous les joueurs, même quand les choses vont dans ton sens ?
Bien sûr que c'est stressant. Le fait de jouer contre Novak, de jouer contre les meilleurs joueurs du monde, on n'a pas de moments où on peut se détendre. Il met la pression. Il nous oblige à jouer notre meilleur tennis puisqu'il peut changer de vitesse très rapidement. Ensuite, il gagne un point, il gagne en énergie et les choses peuvent aller rapidement dans l'autre sens également. Il y a beaucoup de stress. Il est important de rester calme, de prendre son temps de comprendre les différents moments du match. Je pense qu'aujourd'hui, j'ai très bien géré la partie mentale. J'étais en très bonne posture aujourd'hui, mais c'est toujours très stressant.
Félicitations. Tu as parlé du fait que jouer contre Carlos a amélioré ton jeu. Est-ce que tu as appris quelque chose en particulier jouant contre lui et que tu as appliqué à ton jeu, ou même pour le contrer ?
Avec Novak, c'est également le fait d'être plus imprévisible quelquefois. Si je joue tout le temps de la même manière, les adversaires comprennent comment vous faites et on ne peut pas gagner, surtout en cinq sets. Quand quelqu'un trouve une solution, il est difficile de s'en sortir. Il est difficile de trouver un seul point. Si je me regarde jouer l'année dernière sur terre battue, je me suis amélioré. C'est le plus important. Mon approche est la bonne. J'espère que dans un an, je pourrai dire la même chose. C'est mon objectif principal. Ce qui vient vient. Si on travaille dur, les résultats seront là.
"Jouer en finale de Grand Chelem contre Carlos, c'est un moment spécial pour moi"
Qu'est-ce que tu préfères quand tu joues contre Alcaraz ? Est-ce amusant des fois ?
C'est amusant, et pas à la fois. Cela peut aller dans les deux sens. Comme je l'ai déjà dit, on essaie de vraiment se pousser de la meilleure façon possible. Quand c'est un bon match, c'est bien de jouer, pas seulement à regarder. C'est quelque chose de très spécial à jouer. À ce stade, le niveau ne peut pas être plus grand. Jouer en finale de Grand Chelem contre Carlos, c'est un moment spécial pour moi et pour lui également. Il a joué ici l'année dernière. On verra ce qui arrive.
Il est certain que la tension que l'on ressent avant le match et pendant, c'est un peu différent. Nous sommes tous les deux très jeunes, nous sommes différents mais talentueux. Donc, on verra.
Félicitations pour ta victoire ! As-tu l'impression que tu as toujours besoin de te préparer sur le plan tactique pour jouer contre Carlos et analyser le jeu, ou alors votre rivalité est telle que cela n'a pas d'importance parce que tu connais si bien ton jeu que ce ne sera plus une question tactique ?
Je pense que si on regarde toutes les rivalités, tout est une question de tactique maintenant. On ne va pas sur le court simplement pour frapper la balle, il faut comprendre ce qui se passe, ce qui marche ce jour-là parce que les choses peuvent changer. Peut-être que l'on prépare d'une certaine façon et cela ne fonctionne pas. Il faut pouvoir changer son fusil d'épaule. Novak a tellement changé de la manière dont il jouait aujourd'hui, il faut se préparer à contre-attaquer. C'est pour ça qu'il est très important d'être focalisé maintenant. Si on dérape, on perd le match.
"Novak a dit « peut-être », on ne sait donc jamais. On va espérer que ce ne soit pas le cas. Le tennis a besoin de lui"
Il y a environ 20 minutes, Novak a dit à ta place qu'il a peut-être joué son dernier match à Roland-Garros. Il a dit que ce serait un match d'adieu merveilleux. Qu'est-ce que cela évoque pour toi ?
Je ne savais pas. Tout d'abord, on espère que ce n'est pas le cas. Je pense que le tennis a besoin de lui, d'une certaine manière. Le fait d'avoir quelqu'un de différent, des jeunes générations, pour moi, c'est incroyable de le voir dans les vestiaires, et l'énergie qu'il a pour tout. Je l'ai vu s'entraîner hier ou il y a quelques jours. Il est très précis dans tout ce qu'il fait. C'est un vrai modèle pour nous tous. Mais si c'était le cas, je suis heureux d'en faire partie parce que c'est une page d'histoire. Pour moi, également, c'est agréable d'en faire partie. On va espérer que ce ne soit pas le cas. Il a dit « peut-être », on ne sait donc jamais.
Novak faisait tes éloges et parlait de la rapidité et de l'intensité de ton jeu. Tu as appris quelque chose de Novak depuis toutes ces années ?
J'ai appris de nombreuses choses parce que j'ai eu la chance de m'entraîner avec lui quand j'étais plus jeune à Monaco. On s'est beaucoup entraînés. À chaque fois que je posais des questions, il m'a répondu de manière très honnête. Je pense que cela a été très sympa. Les gens ne le perçoivent pas tel qu'il est réellement. Je pense aux personnes de l'extérieur ou les personnes qui ne le connaissent pas, ils ont une tout autre image de lui. C'est quelqu'un de très gentil, avenant. Il est là pour t'aider au moment où tu en as besoin. J'ai beaucoup appris auprès de lui. J'ai l'impression que mon style de jeu, ce n'est pas le même puisque nous sommes différents mais parfois, c'est un peu semblable. J'ai beaucoup regardé ses vidéos. J'ai eu de la chance de pouvoir partager un court avec lui. Lors des matchs, on voit si les choses fonctionnent bien ou non. Il est très important pour moi en tant que joueur et en tant que personne. J'apprécie énormément ses mots gentils parce que cela veut dire que je m'améliore en tant que joueur, c'est la chose la plus importante pour moi.
