A quelques jours du coup d'envoi de la saison 2026, la numéro une mondiale Aryna Sabalenka va affronter Nick Kyrgios, 671e à l'ATP (ex-n°13) dans une "bataille des sexes" à Dubaï. Un match d'exhibition, aux règles modifiées, qui fait débat.

Un nouvel épisode de "bataille des sexes" dans l'histoire du tennis. Dimanche, la numéro une mondiale Aryna Sabalenka et le fantasque australien Nick Kyrgios, ancien 13e mondial redescendu au 671e rang mondial et qui n'a disputé que cinq matchs la saison dernière (pour une victoire), s'affronteront dans un match d'exhibition baptisé ainsi. Le duel aura lieu à la Coca-Cola Arena de Dubaï, à 17 heures (heure française).

Cette pratique d'opposer les hommes et les femmes sur un terrain de tennis n'est pas nouvelle. La première "bataille" des sexes a eu lieu le 13 mais 1973 à l'occasion de la fêtes de mères. Margaret Court, vainqueure de trois Grand Chelem cette année-là, a défié l'ex-numéro un mondial Bobby Riggs qui, après avoir mis un terme à sa carrière, avait déclaré en 1969 qu'"aucune joueuse en activité ne pourrait jamais venir à bout d'un retraité". L'Australienne (30 ans) ne parvient à donner tort à l'Américain (55 ans), vainqueur 6-2, 6-1 à Ramona (Californie) d'un match qu'il surnomme aussitôt le "massacre de la fête des mères"

Mais quelques mois plus tard, une autre vedette du tennis la venge: l'Américaine Billie Jean King (29 ans) terrasse Riggs 6-4, 6-3, 6-3 au terme de la plus célèbre "Bataille des Sexes" de l'histoire du tennis. Disputée à Houston (Texas) devant plus de 30.000 personnes et suivie par plus de 90 millions de téléspectateurs, la rencontre du 20 septembre 1973 est un énorme coup de projecteur pour les joueuses, qui réclament de gagner autant d'argent que leurs homologues masculins.

"Ca nous aurait ramenées 50 ans en arrière si je n'avais pas gagné ce match", juge l'Américaine après sa victoire fondatrice. "Plus que pour la gloire, il était important de le battre pour le changement social et pour la façon dont le public et le sport voyaient les joueuses."

"M'amuser", "faire le spectacle"

Ce dimanche, les enjeux sont bien différents. Ce n'est "pas la même chose", a tranché "BJK" dans une interview à la BBC, diffuseur du match. "C'était un match très politique (...) Ce n'est pas le cas" de l'affrontement entre Kyrgios et Sabalenka, a insisté l'Américaine.

L'objectif sera de "m'amuser" et de mettre Kyrgios "dans une position inconfortable", a d'ailleurs résumé début décembre Aryna Sabalenka. "Nick n'a plus joué depuis un moment, donc c'est un bon début pour lui. Quant à moi, je me prépare à affronter un grand serveur, le gars qui peut te rendre dingue" par ses coups de sang mais aussi ses éclairs de génie, a anticipé la quadruple lauréate en Grand Chelem.

"Je veux que davantage de personnes regardent le tennis", a de son côté souligné Nick Kyrgios au micro de l'animateur britannique Piers Morgan, qui a reçu les deux protagonistes dans son émission le 9 décembre. L'Australien, finaliste à Wimbledon en 2022, est déterminé à "faire le spectacle" tout en "s'amusant un peu" lui aussi.

"C'est diminuer et dévaloriser les capacités de Sabalenka"

Pour équilibrer le duel disputé en deux sets gagnants, les règles ont été aménagées. Chaque participant disposera d'un seul service, et la moitié de court de la Bélarusse aura une superficie inférieure de 9% à celle de son adversaire. "Si on jouait sur un court entier, avec les règles habituelles, ce serait vraiment difficile de me mesurer à des gars", a jugé la reine de la WTA.

"J'ai l'impression qu'il y a que de la com' autour de ça et que finalement le jeu n'arrive qu'en second plan. Ces nouvelles règles, notamment celle d'avoir raccourci le court pour Sabalenka, je trouve ça d'une bêtise absolue", a déploré Alizé Cornet dans les Grandes Gueules du Sport sur RMC samedi, estimant que "la symbolique est absurde" et que "ça ne donne pas une très, très bonne image du tennis féminin. "C'est vraiment un coup de comm énorme et un coup de comm pas très réussi. Donc au final, je suis pas convaincue par le principe. Je trouve ça un peu dommage de le prendre par ce bout-là."

Et l'ex-numéro 11 mondiale et nouvelle capitaine de l'équipe de France féminine de Billie Jean King Cup de poursuivre: "Pourquoi elle (Sabalenka) a accepté ces règles-là? Pourquoi elle a accepté de réduire le terrain alors que c'est la numéro 1 mondiale? Depuis deux ans elle domine de la tête et des épaules le circuit féminin, elle peut quand même jouer sur un terrain normal contre Nick Kyrgios. (...) C'est diminuer et dévaloriser les capacités de Sabalenka."

"Qu'est-ce que le tennis féminin pourrait bien tirer de ce match?"

"Qu'est-ce que le tennis féminin pourrait bien tirer de ce match?", s'est également inquiétée en novembre dans son podcast l'ex-spécialiste australienne du double Rennae Stubbs. "A moins qu'il (Kyrgios) soit sérieusement blessé et incapable de courir, il va gagner ce match tellement facilement", a soupiré l'ex-N.1 mondiale en double, lauréate de quatre tournois majeurs au début des années 2000. Selon elle, la seule raison de ce match est liée au fait qu'Evolve, l'agence gérant les intérêts de Kyrgios et Sabalenka, a l'occasion de "se faire un peu d'argent".

Interrogée par la radio espagnole Cope sur la différence de niveau entre hommes et femmes, l'ex-numéro 1 mondiale Garbine Muguruza a été claire. "Un garçon qui est 1000e mondial, ou qui n'a même pas de classement, peut être bien supérieur à une top 10 du circuit WTA. Quand j'étais à mon meilleur niveau, en étant numéro une mondiale, un junior pouvait me battre", a insisté l'Espagnole, ex-championne de Roland-Garros et Wimbledon. Aryna Sabalenka arrivera-t-elle à lui donner tort? Réponse dimanche.